La Symphonie des éclairs s’allonge. Zaho de Sagazan ajoute sept chansons inédites à son premier album, car, dans le tourbillon qui l’emporte depuis le printemps 2023, elle n’a cessé ni d’écrire ni de composer.
Ces nouvelles chansons de l’intime sont portées par une énergie très électro. On avait déjà découvert Dernier des voyagesdans ses concerts, mais rien encore de L’Envol et son élan existentiel, de Est-ce que tu vas bien ? et sa tendresse post-rupture, de Ô travers et sa profession de foi d’artiste, de Parler l’amour et Hab Sex avec leur explicite sensualité, ou encore de Old Friend, écrit, composé et enregistré avec Tom Odell, celui qui a fait naître chez elle l’envie, l’urgence de faire de la musique.
Pourtant, la succession des événements de 2024 semblait lui laisser peu de temps pour s’atteler à l’écriture de ces morceaux. Après les 116 dates jouées à guichets fermés en 2023, d’autres concerts s’ensuivent : ses premiers Zénith à Paris et à Nantes, les festivals d’été, et deux événements majeurs. Des images historiques resteront gravées dans les mémoires : sa reprise de Sous le ciel de Paris, grand classique de Piaf, Montand et Gréco, au début de la cérémonie de clôture des Jeux de Paris 2024, et son interprétation de Modern Love de David Bowie, offerte à Greta Gerwig, émue aux larmes, lors de l’ouverture du Festival de Cannes.
Son timbre unique traverse les frontières et déclenche des passions. L’ouverture de dates au Canada, à Londres, Berlin, Cologne, Amsterdam, New York, San Francisco ou Los Angeles se fait naturellement. En un rien de temps, tout est Sold Out.
Quelques autres prodiges singuliers ont marqué l’année de la jeune Nazairienne. Avant elle, jamais personne n’avait été couronné quatre fois au cours d’une cérémonie des Victoires de la Musique : album de l’année, chanson originale, révélation féminine, révélation scène. Peu d’artistes émergents ont été distingués par l’Ordre des Arts et des Lettres ou ont reçu le prix du jury et le prix du public aux Music Moves Europe Awards, distinctions de l’Union européenne.
Quand, le 31 mars 2023, La Symphonie des éclairs sortait, l’album confirmait la rumeur surexcitée circulant depuis des événements prometteurs l’année précédente : les Inouïs du Printemps de Bourges, le Chantier des Francos, le prix Chorus des Hauts-de-Seine, les TransMusicales de Rennes… L’enthousiasme général se partage autant dans les sphères professionnelles que personnelles. Les chiffres parlent : album d’or atteint à Noël, album de platine un an plus tard.
Aujourd’hui, les premières cohortes de fans racontent leurs sensations face à cette voix si singulière : une matière en velours métallique, une texture à la fois moelleuse et rêche, un mouvement oscillant entre une vague d’air soyeuse et une onde puissante. Une voix étrange, mais familière, qui s’impose comme celle d’une sœur, d’une meilleure amie, d’une chamane ou d’une psy.
Zaho de Sagazan chante à l’improbable carrefour de Barbara et Koudlam, Christophe et Cold Cave, d’une chanson française introspective et de l’électronique héritière de Kraftwerk. Sa voix dévaste les séductions tranquilles de la chanson traditionnelle. Dans son enfance, elle en avait fait un complexe : « Beaucoup de choses chez moi étaient à l’inverse du féminin, et je ne pouvais pas cacher ma voix. »
Zaho l’a domptée avec acharnement et plaisir. Son rapport à la musique commence par le piano, d’abord détesté, puis maîtrisé de manière autodidacte. À l’adolescence, elle s’immerge dans la chanson classique, admirant l’écriture de Maurice Fanon et de Barbara, tout en explorant une électronique sombre et introspective.
Il lui a fallu du temps pour s’admettre en artiste, tentée d’abord par les métiers du soin, qu’elle rapproche aujourd’hui de son travail de chanteuse : « Je suis la copine qu’on appelle pour parler pendant trois heures. »
Fille d’un père artiste et voyageur, Zaho a grandi sous l’injonction maternelle de « se mettre à la place des autres ». Elle explore dans ses chansons des thèmes universels : l’amour, la souffrance, le doute, l’introspection.
Sa singularité est devenue un phénomène incontournable de la chanson francophone. Le public célèbre sa générosité : un EP de reprises (La Bonne Étoile de -M-, La vie est belle de Brigitte Fontaine, 99 Luftballons de Nena) et maintenant cette version enrichie de La Symphonie des éclairs. Une cavalcade de splendeurs qui marque durablement l’histoire musicale.